Port-traits

Par un soir d'avril, je me sentais vraiment pas bien. J'ai passé à travers le nuage en panique en dessinant compulsivement tout seul dans mon coin au restaurant chinois le plus près, sous la lumière stridente, de la chop suey wonton et du canard laqué plein la yeule. Après un premier dessin très chargé, je me suis mis à faire des portraits plus dépouillés, puis à incorporer les mots "nom" "non" "mom" et "mon". J'ai divagué sur le concept du nom, le nom que nos parents nous donnent, la première chose qui nous appartient, qui nous lie à la société et qu'on ne peut refuser, même à grands coups de NON!. Je me suis questionné également sur la différence entre un défaut et un trait, le défaut pouvant se corriger, le trait étant cimenté dans la personnalité et peu curable. Nous possédons notre nom autant qu'il nous possède. 

Je suis resté vraiment longtemps au restaurant, j'étais pas arrêtable, j'avais peur de virer fou, mais la folie c'est du bon carburant. J'ai griffonné plusieurs visages attristés, apeurés, angoissés ou méfiants et je suis revenu tard chez moi. J'ai dessiné jusqu'à 7h du matin, puis toute la journée le lendemain, encore inspiré, avec deux ou trois heures de sommeil dans le corps. Ça a donné cette série que j'ai appelée les Port-traits.

 

J'ai essayé d'en refaire des semblables mais je n'ai pas su retrouver la même impulsion. Peut-être un jour, mais je veux pas non plus aller remuer de la négativité pour retrouver cet état d'esprit.