061-Facebook comme journal personnel, par Catherine Gendreau

Mathieu St-Onge m’avait demandé de faire une vidéo dans le cadre de son projet « gardage ». Je ne suis pas vraiment une «gardeuse», ou du moins je ne pensais pas l’être, jusqu’à ce que j’admette avoir gardé tous mes journaux intimes, toutes les lettres d’amour, tous les petits papiers échangés en classe durant les cours plates. J’en ai du stock. Si tu penses que je publie trop ici, imagine ce que je peux avoir comme boîtes de papiers/carnets/cahiers chez nous. J’en ai. EN CRISSE.

Pis c’est en jasant avec Mathieu que je me suis rendu compte que Facebook était devenu un peu la suite logique de ce gardage-là. Ma timeline est un journal intime collaboratif "in progress".

Mais je m’haïs en vidéo, je déteste me voir en action, j’assume pas. Alors je le fais par écrit ici, même si je sais que l’algorithme va pas privilégier ça dans le feed.

Mes journaux intimes de jeunesse, je les relis chaque année, et je les annote dans les marges. C’est rendu un peu mongole mon affaire, j’annote mes annotations. Je m’autocritique la critique. Faut le faire, quand même.

Bref, Facebook permet tout ça sans le chiar de devoir créer des annexes papier (oui, j’ai des annexes papier dans mes journaux de jeunesse).

Pis le summum de la patente, c’est que j’ai tellement peur de «perdre» quelque chose qu'il m’arrive, de temps en temps, de publier un statut en mode «moi uniquement». Oui. Pour avoir accès à toute cette information-là sans avoir à gérer la réponse possible. C’est pas anodin comme truc, pis ça en dit long sur moi.

Fait que je vous donne un aperçu de moi à divers moments de ma vie, en lien avec mon fb d’aujourd’hui. Enjoy (ou pas).

(Inclure du «sic» partout, j'étais jeune pis toute)

28 novembre 1991 : «J’ai rêvé que mes parents avaient eu un accident et une famille qui habitait à la campagne m’avait adopté. Ils avaient un garçon surnommé Ten. J’avais ma chambre à moi toute seule et je travaillais et le frère de Ten m’aimais beaucoup. Un jour, je suis partie étudier en ville et Ten m’a montré le champ, après on est revenus. Le 25 janvier 1888 nous nous sommes mariés.»

20 avril 1995 : «Moi qui n’ai pas peur normalement des orages, je capote ce soir. J’écris n’importe quoi et je radote sur ma vie quotidienne parce que j’ai besoin de parler (je dirais plutôt «écrire») à quelqu’un, même si cette personne n’est en fait que l’ombre de ma propre pensée reflétée par un Pilot Violet mine moyenne (j’aime pas les fines) dans un cahier acheté dans le quartier chinois il y a 3 ans par le chum de ma marraine. Radotage sans bon sens. Je ne pense pas que je vais mourir ce soir, ce serait pas mal plate.»

10 septembre 1999 : «Je remets mon avenir en pub en question. Ai-je vraiment envie de passer ma vie à faire des concepts pour des produits scrap, juste pour faire augmenter la consommation de citoyens suiveux? Crosser le monde toute ma vie? Papa m’a dit qu’il avait plus confiance en moi qu’en quiconque par rapport à mon avenir, plus confiance que moi-même. Ça m’a touché vraiment.»

Bref, le projet de Mathieu est vraiment cool, il permet de réfléchir à ce que nous gardons, et surtout au POURQUOI. Si t'es game de faire une vidéo, de publier un truc, c'est super. Sinon, tu peux juste penser à ça de ton bord. Tu vas voir, ce sera pas du temps perdu.